Sunaika Zetsu

Ces longues mèches lui encadraient délicieusement le visage, elle avait un soleil de boucles serrées autour du crâne. Des yeux presques noirs, et un mignon petit nez. Ses yeux globulaires étaient masqués par de longs cils qui papillonnaient quand elle réfléchissait.

Sa famille du côté maternel était assez connue, mais la jeune femme ne s’était jamais réellement intéressée aux personnes influentes de son entourage. Elle avait toujours pensé que ceux qui arrivaient à s’épanouir dans cet endroit sans goût et morose passait leur existence à se mentir à eux-mêmes. Très longtemps, elle avait pensé que ces personnes n’étaient que des ratés qui avaient réussi à se démarquer des autres pour s’y trouver une place quelque peu confortable, mais pas assez pour être projetés au monde. Elle pensait que rien n’était vrai, à Tanima no Kuni, que tout n’était que pièces de théâtre jouées en boucle, et répétées. Que ceux qui y étaient né avait pour destin d’y pourrir. Son expression impassible était célèbre parmi ses camarades et sa famille. Froide, distante, indifférente, elle fixait le geste tendre en cours de déroulement pendant plusieurs minutes en usant de son calme souverain.

Un jour, en rentrant chez elle, le visage en direction du ciel qui n’avait pas tardé à se teindre en noir, elle aperçut quelque chose. Ce ne fut pas de suite clair : au début, ce n’était une tâche sombre qui semblait s’agrandir au fur et à mesure. Et puis les détails se clarifièrent : la tâche sombre n’était rien d’autre qu’une horde de voleurs. Tous plus effrayants les uns plus que les autres.

Le plus terrifiant, c'est qu'il se rapprochait dangereusement de la maison de Sunaika. Il faisait de moins en moins clair, et la nuit s'installait peu à peu sur l'énorme étendue d'arbres. Les pas de la jeune fille tapaient fort contre le sol humide, et le tambour de sa précipitation résonnait comme une cruelle mélodie. Au fur et à mesure qu'elle s'engouffra dans la maison, Sunaika entendait les vrombissements sourds et menaçant de cette horde de monstres, et les lumières de leurs énormes flambeaux faisaient danser les ombres des arbres. Et puis, elle entendait des cris. La peur lui dévorait le ventre, elle se cacha. Avec effroi, elle comprit que c'était ces mêmes hommes qui avaient fait sortir tous les habitants de leur maisons et qui les avaient forcés à s'agenouiller en rang, devant eux.Leurs vêtements étaient amples et crasseux, ils avaient tous un bandeau barré qui cachait leur visages. Un homme défilait, les bras sagement repliés derrière lui. Un kimono blanc recouvrait son buste, et de ses épaules cascadait une aura effrayante. Il avait une arme rangée dans un étui, à sa hanche droite.

Sunaika reconnu sa mère entre tous les habitants. Elle était blessée au bras, et du sang tâchait sa longue tunique. Elle sentit la colère monter en elle. Quelque chose se dessiner, et lui chatouiller le dos. Qui étaient ces gens ? Elle n'en pouvait plus de les regarder avec leur armes en direction de toutes ces personnes innocentes. L'homme au kimono se planta devant les habitants et de sa voix claquante et froide, il lâcha « Je vais vous le demander une dernière fois. Qui reconnaissez-vous comme votre supérieur ? »

Sunaika était perdue. C’était quoi, être supérieur ? Le village dans lequel elle habitait n'était rien de plus qu'une contrée ennuyante. Pourtant l'homme reprit : « Soit vous nous écoutez et toute se passera très bien, soit on brûle votre précieux petit village, et vous avec. » Il s'approcha ensuite de son père, qui était accroupi à la gauche de sa mère, et attrapa son menton de sa main vampirique, comme pour inspecter son visage. De son autre main libre, il sortit son arme de son étui.

Il lâcha son menton, et se redressa.

«  Je vais compter jusqu'à trois, d'accord ? » La brune écarquilla les yeux, pourquoi ne leur donnait-t-il pas tout simplement ce qu'ils voulaient ? C'était important au point de sacrifier des vies ?

«  - Un, deux... »

L'homme marqua une pose, et dirigea la lame contre son cou. Celui-ci ne cillait pas, et regardait l'homme dans le blanc des yeux. Il lui adressa : « Tes derniers mots ? »

«- Vive la résistance. »

Une grimace parcouru le visage du capitaine, et celui-ci dans un mouvement presque habituel, fit glisser sa lame. Une giclée de sang explosa dans la nuit, accompagné d'un cri sourd. Des hoquets de stupeurs et des sanglots parcoururent les rangs agenouillés de villageois. Avec horreur, Sunaika distingua la silhouette de son père s'étendre sur le sol. Gisant aux pieds de l'homme, mort. Celui-ci releva simplement sa lame, ensanglantée. Il annonça « Tuez-les tous et brûlez cette ville. »

Sunaika était toujours cachée, les larmes roulant sur ses joues. La résistance ? Elle ne comprenait rien. Elle s'apprêtait à sortir de sa cachette, à faire un acte moins lâche que de rester cachée ici, puis elle rencontra le regard de sa mère. La femme l'avait remarqué, et l'implorait du regard, en la suppliant de rester cachée. Elle avait les yeux embués de larmes, et secouait lentement la tête, sans quitter le regard de sa fille.

Elle écarquilla les yeux, et sa bouche tomba lorsqu'elle vu la lame d’une épée atteindre sa mère au ventre. Elle plaqua sa main devant sa bouche, étouffant ses sanglots, alors qu'un picotement, poursuivit sur sont dos. Quelque chose semblait s'encrer là-dessus. Elle ne compta pas les minutes (ou était-ce des heures ?) qu'elle passa cachée. Les flammes apportaient la seule et unique lumière de cette lui, à la fois mythique et dangereuse.